Under The Waves – Spleen à 100 mètres de profondeur

Marchant dans les traces de nombreuses aventures narratives à commencer par Firewatch, Under The Waves mélange message écologique et récit introspectif ou quand la douleur d’un père de famille le pousse à littéralement disparaître de la surface de la Terre.

Contemplatif et relaxant, le titre de Parrallel Studio pose d’entrée de jeu les bases de son récit, sorte de fil rouge émaillant les 15 heures nécessaires pour voir le bout de l’aventure. Pour fuir un événement tragique, Stan plonge littéralement dans son travail en acceptant un job de technicien pour le compte de la société UniTrench. L’originalité du poste fait qu’il doit passer plusieurs mois en pleine mer du Nord, dans une station, en autarcie, afin d’entretenir les infrastructures du groupe pétrolier. Seul, quasiment coupé du reste du monde, il pourra toutefois compter sur Tim, une vieille connaissance de son père, qui, en tant que superviseur et ami, lui prodiguera conseils personnels tout en lui donnant son lot de tâches quotidiennes à réaliser. On touche ici du doigt la structure du jeu, routinière puisque découpée en plusieurs journées, mais véritable invitation à la découverte des fonds marins.

Ainsi, pour tenter de casser une certaine redondance, les développeurs ont pensé leur concept en imbriquant gameplay, narration et message écologique dans un tout homogène allant crescendo. Ceci passe en premier lieu par la nature des missions qui nous obligeront à sillonner le hub marin : Nettoyage de zones polluées par des hydrocarbures, remise en marche de certaines machineries, récupération de containers, tout ceci vous demandera d’explorer les alentours à bord de Noon, votre mini sous-marin. Chaque sortie sera alors l’occasion de profiter d’un univers très reposant, les diverses zones recelant plusieurs épaves, cavernes et autres infrastructures peuplées d’animaux marins. Il ne tiendra alors qu’à nous de photographier tout ceci pour en apprendre davantage sur notre environnement, chaque entrée enrichissant un copieux glossaire, ou tout simplement apprécier le voyage en contemplant la nage gracieuse d’une baleine à bosse ou le ballet d’un banc de requins.

Déroulant son récit au grès des journées, Under The Waves opte, à l’image de Firewatch, pour un aspect chill bien que dans le cas présent, les tenants et aboutissants du scénario soient dès le départ trop évidents. On apprend ainsi très vite que Stan a perdu sa fille et qu’il s’est éloigné de sa femme Emma qu’il pourra par ailleurs appeler à certains moments, depuis la station. Si le jeu cherche à apporter une sorte de quotidien à travers diverses actions (faire du café, regarder la télévision, parler avec une IA nous donnant informations et conseils pour passer le temps…), il appuie malheureusement trop souvent sur la corde sensible en rallongeant inutilement certains dialogues (malgré un très bon doublage français), ou en abusant des (pourtant magnifiques) musiques de Nicolas Bredin influencées par Radiohaed ou bien encore Sigur Ros, pour accentuer les états d’âmes de Stan.

La façon de faire pourra paraître un peu grossière d’autant qu’en parallèle, le budget du jeu, qu’on imagine limité, est synonyme de certains choix involontairement drôles comme le fait que Stan se douche avec son bonnet et sa combinaison. Anecdotique mais n’aidant pas toujours à s’immerger pleinement, au sens propre comme au sens figuré. Au final, on aurait apprécié que les développeurs laissent tomber certains détails « Naughty Dogesques » (le fait de faire des grimaces devant la glace) pour se concentrer sur d’autres plus importants, d’ordre techniques par exemple. On saluera toutefois la bonne idée d’avoir intégré deux mini-jeux plutôt sympathiques (le punching ball et la guitare) afin de varier les occupations lors des retours de missions ou bien encore le suivi pour résoudre les nombreux bugs présents lors du lancement.

Mentionnons également des ambiances lorgnant avec le genre horrifique, à l’image de certains passages évoquant un titre comme Dead Space, aussi bien à travers le décor, la lumière ou le son. Pour autant, pas d’ennemis dans Under The Waves, ni de véritable Game Over. On devra cependant ramasser quelques matériaux (charbon, algues…) pour améliorer notre équipement ou construire des tubes d’oxygène, des mines et autres boosts de plongée. Cet aspect ne sera néanmoins jamais bloquant compte tenu du fait qu’on trouvera de multiples objets afin de ne jamais être dans une impasse en nous obligeant à trouver un établi pour crafter.

On pourra alors profiter pleinement de l’atmosphère du jeu et de chaque plongée d’autant que le gameplay s’avère agréable, autant en pilotant Moon qu’en nageant. Se faisant, Under the Waves déroulera son histoire en essayant de développer la personnalité de Stan. Malheureusement, on notera encore une fois quelques lourdeurs d’écriture, notre bougre ne cessant jamais vraiment de se morfondre en ressassant inlassablement le passé. On finirait presque par espérer entendre Stan et Tim maugréer contre UniTrench et oublier ce qui nous a amené ici. Etrange sensation donc, à l’image du jeu oscillant entre de très beaux panoramas, une ambiance réussie et des phases narratives presque intrusives bien qu’indispensables à l’avancée de l’intrigue.

Profitant d’une très belle ambiance, de superbes musiques et d’une progression agréable, Under The Waves échoue malheureusement à proposer une histoire suffisamment convaincante, la faute à de grosses lourdeurs d’écritures et un personnage retombant inlassablement dans un état semi dépressif au point de plomber le récit, et ce malgré la beauté de quelques idées de mises en scène. Reste néanmoins un jeu intéressant, par moments très immersif, et intégrant intelligemment sa dimension écologique.

Yannick Le Fur

Yannick Le Fur

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