Fortement influencée par le cinéma, la saga Uncharted aura démontré à travers chacun de ses épisodes une science de la mise en scène, A Thief’s End parvenant même à conjuguer grand spectacle et forme plus intimiste en s’intéressant de plus près à la vie de ses héros. Il était donc logique que le cinéma s’empare à son tour de cette saga afin de la transposer sur grand écran. Nanti d’un budget conséquent et d’un duo de stars, le film Uncharted échoue pourtant lamentablement sur tous les niveaux en ne faisant que mettre en avant les immenses qualités de son inspiration de pixels.
Optant pour une origin story, afin d’introduire univers et personnages à celles et ceux n’ayant pas eu la chance de toucher aux jeux de Naughty Dog, le scénario d‘Uncharted assume dès les premières minutes ses liens de parenté avec la série vidéoludique en copiant/collant l’un des morceaux de bravoure d’Uncharted 3. Nathan (Tom Holland) se retrouve dans les airs, accroché par une simple sangle à un lot de caisses en perdition tombé d’un avion cargo. Le film opère alors un retour dans le temps afin de nous expliquer comment le jeune freluquet est arrivé dans cette fâcheuse situation. Une idée somme toute classique mais pas si bête que ça d’autant que le long métrage reprend également certains éléments des troisième et quatrièmes volets vidéoludiques en revenant sur l’enfance de Nathan et de son frère Sam, tous deux résidant alors dans un orphelinat tenu par des Soeurs suite à la perte de leurs parents. L’occasion de lier passé et présent via un MacGuffin sous forme de carte ancienne que les deux frères convoitent ardemment puisque supposé mener au trésor de Fernand de Magellan, estimé à cinq milliards de dollars. Alors que les deux frères sont obligés de se séparer, Nath. poursuit son petit bonhomme de chemin et se trouve un job de barman lui permettant de singer le Tom Cruise de Cocktail mais aussi et surtout de voler les bijoux de riches filles à papa un peu sottes. Il ne tarde pas à rencontrer Victor Sullivan (Sulli), lui même à la recherche du trésor de Magellan, avec qui il va former un duo digne des buddie movies qui pullulaient dans les années 80/90.
Vu sous cet angle, le film semble avoir de sérieux atouts pour séduire d’autant que Tom Holland fait montre d’une véritable énergie en effectuant d’ailleurs plusieurs cascades. Sauf qu’au delà de cette relative fidélité aux jeux, le film montre rapidement de gros problèmes de structure et de rythme. Déjà, l’action est très mal répartie sur l’ensemble du long-métrage d’1h56 d’autant que les 45 premières minutes se montrent extrêmement avares en péripéties, surtout si on les compare aux standards en date que sont les Mission Impossible ou, au hasard, un film comme Hobbs & Shaw mené tambour battant. Ballot pour un blockbuster. Conventionnelles et vite expédiées, les séquences d’action subissent également de plein fouet la comparaison avec leurs homologues vidéoludiques d’autant que les principaux antagonistes, à commencer par Braddock (Tati Gabrielle), sont soit très mal utilisés soit, à l’image de Santiago (Antonio Banderas), complètement sous-exploités.
D’ailleurs, pour palier à ce manque de méchants charismatiques et insuffler un peu plus de dynamisme aux deux premiers actes, les scénaristes ont rapidement intégré Chloé Frazer (Sophia Taylor Ali) afin d’offrir à Nathan et Sullivan un contrepoids féminin. Si le tout aura le mérite de faire plaisir aux fans, les frasques du trio ne sont malheureusement guère aidées par une écriture paresseuse et une intrigue cousue de fil blanc.
A ce sujet, bien que le voyage de Nath soit mû par les indices laissés par Sam, la présence fantomatique de celui-ci reste peu utile d’autant qu’on voit poindre à des kilomètres là où veut nous emmener le film.
Et c’est bien là le problème d’Uncharted qui ne réussit jamais à faire mieux que ses modèles vidéoludiques ou ses concurrents directs. Bien que le troisième acte (partiellement spoilé dans les trailers, chose de plus en plus fréquente à Hollywood) se veuille plus spectaculaire, la mise en scène de Ruben Fleischer (Bienvenue à Zombileland, Venom) s’avère tellement foutraque qu’on ne comprend pas grand chose à ce qui se passe sous nos yeux. Agitant frénétiquement sa caméra afin de filmer les cabrioles de son jeune héros, Fleisher en oublie complètement de soigner ses cadrages, préférant se reposer sur ses navires en CGI et des fonds verts pas toujours au niveau. Difficile dans ce cas d’être tendre avec cette adaptation qui, nantie d’un budget de 120 millions, ne parvient jamais vraiment à faire rêver et ne donne au final que l’envie de rallumer sa console pour retrouver le goût de l’aventure.
Malgré son acteur bankable et une fidélité aux jeux, Uncharted se casse les dents à cause d’un rythme bien trop décousu, une écriture paresseuse synonyme d’histoire prévisible et un humour forcé (coucou Nolan North). Renvoyant à ses illustres modèles, Indiana Jones et la Dernière Croisade en tête, sans jamais parvenir ne serait-ce qu’à le côtoyer, le film de Ruben Fleischer s’avère aussi convenu qu’oubliable.