OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire – L’espion qui ramait

Douze ans qu’Hubert Bonisseur de Labath n’avait pas donné de nouvelles. Douze ans à espérer le retour de ce pastiche de James Bond aussi à l’aise pour balancer une manchette qu’une vanne toujours à la limite du bon goût. Son retour était attendu mais au final, force est de constater que l’espion a perdu de sa superbe, autant dans son assurance que dans sa capacité à faire rire.

Le constat est sans appel, OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire ne tient jamais vraiment la comparaison avec les deux films de Michel Hazanavicius. On pourrait en premier lieu arguer du fait que le changement de réalisateur explique cet état de faits. D’un certain côté, ce serait la solution de facilité sauf que la réalisation de Nicolas Bedos s’avère classique mais suffisante pour cette comédie d’action davantage mue par ses punchlines et ses traits d’humour que sa mise en scène.

Pour autant, le vrai problème vient de son scénario derrière lequel on retrouve pourtant Jean-François Halin, déjà à l’oeuvre sur les deux précédentes aventures d’OSS 117.

Troquant les années 60/70 pour les années 80, le film met en scène un OSS semblant avoir perdu son «mojo». Bien que le scénario s’en amuse en le confrontant notamment au sémillant personnage campé par Pierre Niney représentant la nouvelle génération d’agents, plus actuelle et tout aussi létale, l’ensemble s’avère moins percutant et surtout moins inspiré, au point de répéter en l’espace d’une heure la même blague (sur l’impuissance d’OSS). Certes, on y trouve de bonnes idées (la blague de Tintin au Congo, l’intégration d’OSS au service informatique, certains gags de situation fortement aidés par l’interprétation de Jean Dujardin, toujours aussi à l’aise dans le rôle) mais la longueur excessive du long-métrage (plus de 2h) ne l’aide pas et produit un sentiment de lassitude au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue. Paradoxal d’autant que cet opus s’inscrit davantage dans une relecture humoristique de James Bond, de son générique singeant ceux que de Maurice Binder, à certaines de ses scènes d’action.

On pourra également être décontenancé par le politiquement incorrect de cet opus, non pas dans sa propension à aligner blagues sexistes et racistes à une époque où le moindre débordement est mis au pilori, mais dans sa façon de l’amener. En effet, là où les précédents films se moquaient ouvertement de OSS à travers ses nombreux abus, la nature raciste, macho et ostentatoire de l’agent, Alerte Rouge en Afrique Noire offre à son personnage principal davantage de conscience de ce qu’il doit dire et faire. De facto, ses réactions, réflexions et autres écarts prennent une tournure différente, du moins pour le spectateur, en ne réussissant jamais à provoquer de véritables rires francs.

Saupoudrant l’ensemble de quelques clins d’oeil aux films précédents, qui ne parviennent qu’à nous rappeler à quel point ils étaient plus drôles et mieux construits, Alerte Rouge en Afrique Noire s’enlise dans son intrigue en ne parvenant que rarement à se renouveler. Ironiquement, le personnage de OSS 1001, censé dynamiser le tout, empêche le film de pleinement s’émanciper comme il aurait pu, la faute à une écriture banale et sans surprise. Reste donc un opus distillant quelques moments savoureux et un certain exotisme mais ne cherchant jamais vraiment à creuser sa matière première en préférant faire de ses personnages des sortes de fac-similés de ce qu’ils étaient précédemment.

Guère aidé par une écriture jamais à la hauteur de celles des épisodes précédents et certains personnages peu utiles, OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire s’empêtre dans une succession de gags redondants et une caractérisation maladroite d’OSS. Se présentant davantage comme un personnage plus soucieux de son image que l’insupportable mais irrésistible agent imbus de lui-même qu’il était autrefois, il est ici plus difficile de pleinement l’accompagner dans ses excès. Moins drôle, percutant et inspiré que ses prédécesseurs, ce nouvel OSS peine à retrouver la magie des deux précédents films et devra se contenter d’une intrigue s’étirant en longueur et n’arrivant que difficilement à provoquer quelques sourires, parfois gênés, à défaut de véritables éclats de rire.

Yannick Le Fur

Yannick Le Fur

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