Associer Mario, Les Lapins Crétins et le X-Com like sonne comme une blague un peu étrange tant ces éléments ne semblent rien avoir en commun. Pourtant, force est de constater que pour un galop d’essai, Ubisoft a trouvé la formule magique afin de créer un tout cohérent, imparfait, mais diablement prenant.
Malgré certains traits d’humour réussis ou quelques passages forts bien mis en scène (la délicieuse apparition musicale de Phantom, boss sous forme de Lapin baryton), éludons sciemment le scénario prétexte (synonyme de royaume à sauver d’une menace répondant au nom de Bowser) pour nous pencher directement sur le contenu du titre. Découpé en 4 mondes joliment génériques (fleuri, sablonneux, glacial et industriel), Kingdom Battle va nous demander de les visiter les uns à la suite des autres pour faire avancer le scénario (logique) mais aussi et surtout pour récupérer certains personnages de notre équipe qu’on pourrait scinder en deux : les versions normales et celles «Lapins Crétinisées». L’un dans l’autre, ça peut paraître anodin mais le gameplay s’articule pourtant autour de cette complémentarité entre les différents persos afin de composer des équipes capables d’affronter n’importe quelle situation. Cependant, avant de tous les obtenir, vous devrez arpenter de vastes niveaux truffés d’énigmes plutôt sympathiques bien que subissant un léger manque de précision lorsque notre groupe doit pousser des blocs. On notera également certains passages inutilement longs avec moult interrupteurs à actionner pour créer le chemin nous menant vers la prochaine bataille.
Quoiqu’il en soit, vous aurez ainsi à votre disposition les 8 personnages suivants : Mario, Luigi, Peach, Yoshi et leurs équivalents en Lapins Crétins. Outre une arme principale et secondaire spécifiques, chacun d’entre eux auront également des caractéristiques (PV, déplacement, dash, jump…) propres mais aussi et surtout un arbre de compétences qu’il faudra débloquer en récupérant des orbes de puissance disséminés un peu partout ou en obtenant le meilleur rang possible à l’issue de chaque bataille. Si dans l’absolu, il sera possible de garder la même team du début à la fin, dans les faits, vous devrez souvent en changer pour ne pas bloquer d’autant qu’au fur et à mesure de notre avancée, le challenge se corsera bien que tournant toujours autour de trois types de défis : escorte, atteinte de zones précises ou élimination de l’ensemble des cibles. Le score obtenu à la fin de chaque combat (de Bon à Parfait) dépendra alors du nombre d’unités en vie mais aussi du nombre de tours nécessaires pour boucler le challenge.
Bien entendu, en fonction des mondes, vos ennemis évolueront également. On passera alors d’adversaires assez faiblards et peu dangereux à des fantômes ayant la capacité de se téléporter sur de longues distances, des mastodontes, lents et puissants, des adversaires en armure et bien d’autres encore. De plus, les inévitables boss seront de la partie et demanderont un peu plus de concentration de votre part.
Si on excepte son univers mélangeant deux franchises n’ayant de prime abord rien en commun, ce premier Mario et Les lapins Crétins s’avère assez classique dans sa proposition puisque basé sur du tour par tour. Pourtant, il est grisant d’enchaîner les affrontements en testant des combinaisons de personnages pour venir à bout de défis semblant parfois impossibles, surtout lorsqu’on se lance dans le 100% et ses challenges Hyper Difficile et Ultime. De fait, à mesure qu’on progresse, on se prendra d’affection pour tel ou tel trio en privilégiant une approche subtile tenant compte des capacités de chacun : Possibilité de faire venir plusieurs adversaires vers soi pour les frapper en une seule fois, double tacle, génération d’un bouclier… les possibilités s’avèrent nombreuses.
Certes, certaines combinaisons s’avèrent tellement puissantes (Triple Tir de Luigi + Puissance accrue de Mario + Healing de Rabbid Peach) qu’on aura tendance à utiliser de plus en plus le même groupe en fonction de son style de jeu mais Ubi a prévu le coup et a également intégré une notion de déplacement très importante. Ainsi, certains personnages pourront couvrir plus de distance (en sautant, en sortant d’un tuyau) et ainsi se placer pour aider les autres membres à mieux se positionner à leur tour sur la surface de combat via un saut assisté. Ceci n’a l’air de rien mais compte tenu du fait qu’un tir en hauteur pourra engendrer (ici aussi en fonction des personnages) beaucoup plus de dégâts, vous comprendrez que votre positionnement sur la surface de combat sera une donnée à ne pas négliger. Cependant, on pourra trouver étrange que les développeurs n’aient pas davantage développé cet aspect en optant pour des dégâts accrus en fonction de notre position (devant, derrière, sur les côtés) par rapport à l’ennemi.
Le reste de la stratégie consistera à user au mieux des armes des combattants (lance-roquettes, gatling, bombes sur roulettes…) associées à une spécificité (Rebond, Miel, Ténèbres) pour maximiser les dégâts, ralentir ou aveugler ses adversaires voire créer des combos en se reposant sur les capacités décrites plus avant.
Mentionnons également le DLC centré autour de Donkey Kong qui vient compléter le contenu déjà très riche de l’aventure principale. S’il ne rabat pas les cartes, il intègre deux personnages supplémentaires (DK donc mais aussi Rabbid Cranky Kong) disposant chacun de capacités spécifiques (DK peut lancer un perso ou un objet présent sur la surface de combat, Cranky peut endormir les ennemis, etc) et nous oblige à jouer avec un groupe uniquement composé des deux persos précités ainsi que Rabbid Peach. Rien de très original en soi mais le nouvel environnement (un archipel d’îles où il faudra retrouver des pièces de la machine à laver pour retourner au Royaume de Peach), le bestiaire en partie renouvelé (avec entre autres les très ennuyants Collectionneurs ayant la désagréable habitude de tout le temps nous fuir) et certaines mécaniques supplémentaires suffisent à nous retenir pour quelques combats de plus.
Au final, Kingdom Battle réussit l’exploit de conjuguer un gameplay très accessible à un ensemble de possibilités rendant les combats de plus en plus tactiques et intéressants. Rarement frustrant (sorti de quelques check points mal placés) et réclamant une bonne connaissance des adversaires pour anticiper leurs réactions, le titre se montre passionnant à mesure qu’on enchaîne les parties. On retiendra toutefois quelques travers de certains jeux Ubisoft avec une exploration principalement basée sur des Collectibles à récupérer (illustrations, modèles 3D, musiques) ou un surplus d’armes à disposition (plus de 25 par personnages dont les ¾ inintéressantes et/ou trop similaires entre elles hormis un skin différent) mais rien qui ne vienne minimiser l’aspect tactique du jeu, et c’est bien là le principal.
Etonnant jeu que ce Mario et Les lapins Crétins : Kingdom Battle parvenant à concrétiser une proposition de base qui avait tout à prouver. Si on pourra lui reprocher une exploration peu intéressante, un surplus inutile d’armes ou certains combats agaçants à cause de check points mal placés, impossible de ne pas louer les mérites d’Ubi. qui est parvenu à démocratiser un genre assez austère en mixant deux univers aussi colorés et déjantés. Construit autour d’un excellent système de combat et d’une difficulté parfaitement dosée destinant le jeu à un large public, Kingdom Battle s’avère prenant de bout en bout en parvenant à suffisamment se réinventer à travers ses défis mettant en exergue la complémentarité de ses personnages. Très beau tour de force !