Love, Death + Robots V01 : L’animation dans tous ses états

Chapeautée par David Fincher himself, la première saison de Love, Death + Robots propose pas moins de 18 segments pensés et conçus par autant de studios différents. Brassant de multiples thèmes autour de la science-fiction, l’horreur ou même l’humour, ce premier Volume propose de multiples approches visuelles à même de donner vie à des récits aussi divers que variés. Passage en revue de cette première salve d’épisodes.

  • Episode 01 : L’Avantage De Sonnie
  • Durée : 17 minutes

Ce premier épisode s’inscrit parfaitement dans le principe d’anthologie en profitant d’un univers SF très visuel, d’un concept intéressant (le combat en arène de créatures dirigées mentalement par des humains) et d’un excellent twist. Servi par un très beau character design de Cédric Peyravernay (Dishonored), affichant une animation de qualité (provenant de Blur Studio) et renvoyant par moments au Pacific Rim de Guillermo del Toro, L’Avantage de Sonnie donne le La de la partition à venir.

  • Episode 02 : Les Trois Robots
  • Durée : 11 minutes

Tranchant radicalement en termes d’ambiance avec le premier segment, Les Trois Robots s’amuse à étudier les habitudes de l’espèce humaine après que celle-ci ait disparu suite à une guerre nucléaire. Ironique, dès son premier plan évoquant le Terminator de James Cameron, l’épisode en prend rapidement le contre-pied grâce à un humour faisant souvent mouche et devant autant aux caractères complémentaires des robots qu’à leurs délicieuses réflexions ou bien encore la petite surprise de fin.

  • Episode 03 : Le Témoin
  • Durée : 12 minutes

A mi chemin entre le cinéma d’Hitchcock et celui de Polanski, Le Témoin est synonyme de course-poursuite entre une femme ayant assistée à un meurtre et l’assassin. Se déroulant dans des décors photoréalistes, l’épisode produit une impression étrange à cause d’effets de style et de focales déformées à l’image du character design, comme si le studio avait cherché à profiter d’une sorte d’effet uncanny valley assumé. La découverte de la ville est hypnotique grâce à un rythme effréné et son aspect found footage parfois proche du snuff movie débouche sur une fin ici aussi des plus dérangeantes.

  • Episode 04 : Des Fermiers Equipés
  • Durée : 17 minutes

Un design typé BD et une action quasi non stop, voici comment on pourrait résumer cet épisode lorgnant du côté de Starship Troopers. Manquant un peu d’émotion ou même de contexte, le twist final ne faisant que renforcer cette impression, Des Fermiers Equipés vaut surtout pour son rythme mené tambour battant, le design de ses mechas ou bien encore cette sorte de dichotomie entre l’univers agricole et ses batailles épiques contre des hordes de créatures provenant d’étranges failles. Une petite friandise très sympathique mais inférieure aux précédents segments.

  • Episode 05 : Un Vieux Démon
  • Durée : 12 minutes

Entièrement conçu en 2D, Un Vieux Démon aurait pu être réalisé par Robert Rodriguez tant le tout ne perd pas de temps en explications diverses et préfère se concentrer sur l’action décomplexée. Le but est ici d’offrir un spectacle jouissif synonyme d’affrontement entre une escouade de mercenaires et l’Empaleur, démon séculaire et très affamé dont la seule faiblesse semble être les chats. Virevoltant, l’épisode multiplie les scènes choc grâce à une animation mettant en valeur un design très comic book. Pulp et gore à souhait.

  • Episode 06 : La Revanche du Yaourt
  • Durée : 6 minutes

Raconter comment un yaourt doué de pensée a conquis le monde en proposant des solutions, notamment économiques, pour améliorer le sort de l’humanité. C’est ce pitch hautement improbable qui sert de canevas scénaristique à cet épisode aussi cynique qu’étonnant. Brossant un portrait peu reluisant de dirigeants américains cupides et hautains, La Revanche du Yaourt fait sourire tout en amenant une réflexion en filigrane sur le devenir du genre humain.

  • Episode 07 : Derrière La Faille
  • Durée : 17 minutes

L’une des prouesses techniques de cette première saison de Love, Death + Robots nous vient de France puisque Derrière La Faille a été réalisé par le studio français Unit Image. Très impressionnant techniquement (aussi bien dans ses décors que les visages des protagonistes), le segment s’en sort correctement dans le fond bien que le tout soit somme toute classique et que l’ensemble ne tienne que grâce à son twist. Ainsi, on trouvera par exemple dommage que seul Tom, le capitaine de l’équipage effectuant un retour de mission spatiale, ait le droit à un traitement particulier, les deux autres membres étant complètement laissés dans l’ombre. Le tout aurait gagné à intégrer davantage les autres protagonistes afin de mieux répartir le suspens et la tension intervenant simplement dans les cinq dernières minutes et ce jusqu’à l’effroyable vérité. Au final, un épisode valant plutôt pour sa technicité que son traitement de la nouvelle d’Alastair Reynolds.

  • Episode 08 : Bonne Chasse
  • Durée : 17 minutes

Débutant dans une campagne chinoise remplie de légendes, nous y faisons la connaissance de Liang, fils de chasseur de Hulijing (femme-renarde séduisant les hommes) qui va rencontrer Yan, dont la mère a été tuée par le père du jeune homme. Quittant leur terre natale pour la ville de Hong Kong profitant de l’essor industriel, Liang va très vite se spécialiser dans la conception d’automates pendant que Yan subit de plein fouet cet univers steampunk ayant troqué la magie contre la science. Très bel épisode devant autant au manga Gunnm qu’à certaines œuvres du studio Ghibli. Poétique et tragique à la fois, Bonne Chasse prend le meilleur de deux mondes afin de tracer les lignes d’une histoire fantastique bâtie sur une réalité historique. Un excellent segment.

  • Episode 09 : La Décharge
  • Durée : 10 minutes

Sans doute l’un des épisodes les plus faibles de cette première saison puisque ne racontant au final pas grand chose si ce n’est la découverte d’une gigantesque créature prénommée Pearly dans une décharge de la ville. Un contrôleur assermenté en fera d’ailleurs les frais en servant de petite gâterie à la créature s’étant liée d’amitié avec le propriétaire des lieux. Très banal, le tout bénéfice par ailleurs d’un design tout aussi classique.

  • Episode 10 : Métamorphes
  • Durée : 16 minutes

Et si l’armée américaine engageait des loups-garous dans sa guerre contre les Talibans ? Voici le pitch de départ de Métamorphes qui suit une escouade de soldats en mission comptant dans ses rangs deux loups-garous. Idée intéressante mais semblant un peu prisonnière de son format en ne parvenant pas réellement à développer son intrigue. Ne reste au final qu’une ambiance plutôt réussie et un affrontement cru et violent, mais malheureusement un peu court, venant ponctuer cette histoire.

  • Episode 11 : Le Coup De Main
  • Durée : 10 minutes

Dans la veine d’un Gravity, Le Coup de Main s’attarde sur les déboires d’Alex, astronaute effectuant une réparation sur un satellite dans l’espace. Un clou vient alors percuter sa réserve d’oxygène et la propulse hors d’atteinte de son vaisseau. N’ayant plus que 15 minutes d’oxygène, Alex va devoir trouver un moyen de rejoindre son module. Anxiogène à souhait, l’épisode nous fait retenir notre souffle en même temps que le personnage principal et ce jusqu’à son dénouement aussi «déchirant» que réussi.

  • Episode 12 : Les Esprits De La nuit
  • Durée : 10 minutes

Ce segment s’intéresse au sort d’un père et de son fils dont la voiture tombe en panne dans le désert. Alors qu’ils y passent la nuit, ils vont découvrir un monde merveilleux et insoupçonné peuplé de multiples espèces marines. Plutôt qu’un véritable épisode, on parlera ici d’exercice de style puisque le tout ne raconte finalement rien. Le bon (le design, certaines idées visuelles) et le moins bon (l’absence d’histoire et une fin un peu abrupte) se côtoient durant un peu plus de 10 minutes.

  • Episode 13 : Lucky 13
  • Durée : 14 minutes

Axant son récit autour du respect d’un pilote envers son vaisseau, le Lucky 13, ayant la réputation de porter malheur, l’épisode suite l’histoire de ces deux «personnages» à travers une suite de missions de sauvetage. Malgré la durée réduite et diverses ellipses narratives, ce segment parvient parfaitement, grâce sa réalisation, son niveau technique, sa musique et sa voix OFF, à susciter l’émotion du spectateur tout en proposant quelques séquences d’action impressionnantes.

  • Episode 14 : L’Œuvre De Zima
  • Durée : 10 minutes

L’un des meilleurs épisodes de cette saison revient sur l’artiste Zima, sorte de Banksy intersidéral dont les œuvres artistiques prennent de plus en plus d’ampleur. Se parant d’un magnifique design, évoquant quelque peu le style de Peter Chung (Aeon Flux), l’épisode propose une belle réflexion philosophique sur le sens de la vie et le besoin de revenir à ses origines, à quelque chose de simple pour comprendre et apprécier ce qui fait le sel de l’existence. Un très beau moment.

  • Episode 15 : Angle Mort
  • Durée : 8 minutes

Une équipe de 4 braqueurs cybernétiques décide de s’attaquer à un convoi hautement gardé. L’histoire d’Angle Mort ne va pas plus loin. Vous aurez donc compris que cet épisode se repose davantage sur son action que sur son histoire et le moins qu’on puisse dire est que c’est maîtrisé. Dynamique dans ses cadrages et sa réal, l’épisode va à 100 à l’heure en enchaînant les morceaux de bravoure jusqu’à sa fin aussi explosive que rigolote. Ici encore, on parlera plus d’exercice de style mais quel style !

  • Episode 16 : L’Âge de Glace
  • Durée : 10 minutes

Un petit côté Amblin Entertainment pour ce nouvel épisode se déroulant, une fois n’est pas coutume, principalement en live. Deux jeunes propriétaires d’un appartement, joués par Mary Elizabeth Winstead (Die Hard 4, la série Fargo) et Topher Grace (That’s Seventies Show) découvrent dans leur frigo une civilisation entière qui évolue à la vitesse Grand V. On assiste alors, via un étonnant ballet numérique, à la fin d’une ère remplacée par une nouvelle et ce jusqu’à l’extinction de ladite civilisation. Le côté magique de l’ensemble fait qu’on apprécie pleinement le spectacle sans rechercher une quelconque explication, l’épisode se suffisant alors à lui même dans ce qu’il montre, le but étant de nous faire rêver. Mission réussie.

  • Episode 17 : Histoires Alternatives
  • Durée : 7 minutes

Et si Hitler avait été accepté à l’académie des Beaux Arts, que se serait-il passé ? Cette question, nous nous la sommes tous posés et elle a d’ailleurs donné lieu à l’excellent ouvrage La Part de l’Autre. De son côté, Histoires Alternatives se penche sur six scénarios dans lequels Hitler trouve la mort. De la plus fantasque (étouffé par un gigantesque morceau de gelée) à la plus crédible (écrasé par un chariot en traversant la rue), l’épisode décrit la suite des événements de 1908 au premier pas sur la Lune. Un exercice extrêmement drôle, malgré le sujet, au rythme millimétré, pour l’un des meilleurs épisodes de cette première saison.

  • Episode 18 : Une Guerre Secrète
  • Durée : 16 minutes

Le dernier épisode de l’anthologie frappe fort, en premier lieu d’un point de vue technique. On y suite l’Armée Rouge arrivant dans un village où tous les habitants ont été sauvagement tués par des hordes de démons invoqués il y a quelques années lors d’un rituel satanique (évoquant celui d’Hellboy) qui a mal tourné. Somptueux sur la forme (autant dans ses décors, la modélisation de ses personnages, ses vfx ou bien encore sa réalisation), Une Guerre Secrète frustre plus qu’il ne déçoit tant on aurait aimé voir l’univers développé dans un moyen ou long-métrage. On devra se contenter d’un épisode se terminant après 16 petites minutes, dans la violence et le don de soi.

Une première saison brillante recelant de très nombreuses pépites autant dans l’humour que l’horreur, la contemplation ou bien encore l’action. Embrassant le plus souvent son concept avec des histoires parfaitement adaptées au format et aux twists réussis, cette première salve d’épisodes de Love, Death + Robots étonne par sa qualité et ce malgré quelques segments forcément plus faibles que d’autres.

Yannick Le Fur

Yannick Le Fur

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