Love, Death + Robots V02 : La technique a ses raisons que la raison ignore

Après une excellente première saison, l’anthologie Love, Death + Robots revient pour une Saison 2 plus courte, puisque simplement composée de 8 épisodes. Très aboutie artistiquement, la saison manque sans doute un peu de cœur, de fond et se voit souvent à la merci de ses durées très courtes ne permettant pas aux scénaristes de suffisamment développer leurs histoires. Pour autant, l’ensemble reste d’un bon niveau et propose un concentré d’humour, de tension et de technicité.

  • Episode 01 : Le Robot et la Vieille Dame
  • Durée : 12 minutes

On commence avec légèreté par un épisode se déroulant dans un futur non défini où la population se montre plus oisive que jamais en laissant toutes les tâches quotidiennes aux bons soins de robots. Evoquant, dans son contexte, la deuxième partie de l’excellent Wall-E, l’histoire se concentre sur les mésaventures d’une vieille dame et de son adorable petit chien en proie à leur robot domestique essayant de les tuer après un dysfonctionnement. L’épisode enchaîne les gags avec brio en usant des fonctions premières du robot ou bien encore de l’aspect très cute du toutou. Une mise en bouche exquise, bien rythmée et au character design très marqué.

  • Episode 02 : Le Témoin
  • Durée : 13 minutes

Bien que l’ensemble profite d’un très beau design (empruntant ici aussi au style de Peter Chung avec ces corps longilignes), l’épisode se focalise sur une course entre deux frangins et une bande de jeunes, parfaitement mise en scène mais ne parvenant pas à creuser les thématiques de la fraternité et du rejet de l’autre. Il est également frustrant que l’univers de l’épisode (un gigantesque avant-poste colonial terrien se trouvant sur une planète glacée) ne soit pas développé et que les personnages manquent d’épaisseur, ceci minimisant l’importance de la relation entre Fletcher et Sedgewick, le premier possédant des capacités augmentées (à l’image de la plupart des locaux) à l’inverse du second.

  • Episode 03 : Groupe d’intervention
  • Durée : 18 minutes

S’inspirant de Blade Runner pour une partie de son esthétique, l’épisode se situe dans un avenir lointain semblant avoir vécu plusieurs guerres comme en témoignent les vestiges d’une vie passée. Alors qu’on retrouve, à l’image de Metropolis, les différentes classes sociales vivant en hauteur pour les plus aisées, les pauvres étant cantonnés dans les bas-fonds de la société d’avant, l’idée la plus intéressante de ce segment vient du fait que n’importe-qui semble pouvoir prétendre à une vie meilleure ainsi qu’à l’immortalité, à condition de ne pas avoir d’enfants. La régulation se voulant drastique, les policiers, dont fait partie Briggs, le personnage principal, ont pour devoir de traquer non pas des Réplicants mais les enfants encore en vie. L’épisode réussit à dérouler son concept tout en s’attardant sur Briggs qui, pris de remords, cherchera à comprendre pourquoi certains humains s’évertuent à élever des bambins plutôt que de profiter d’une longue existence à l’abri du besoin. Intéressant mais frustrant puisque que le concept de départ aurait mérité un format long pour enrichir ses thématiques à commencer par l’idée même d’immortalité et tout ce que ça implique.

  • Episode 04 : Snow et le désert
  • Durée : 18 minutes

Après nous avoir offert l’un des épisodes les plus aboutis techniquement de la première saison, les frenchies de Unit Image remettent le couvert avec un second segment. Photoréaliste, Snow et le désert étonne grâce à son niveau de détails, son action rondement menée et sa galerie de créatures. Dommage toutefois qu’une fois de plus, le studio s’attarde davantage sur son rythme, son action plutôt que ses personnages à commencer par Snow qu’on ne situe pas vraiment au delà de ses capacités de régénération et sa pseudo immortalité. On retiendra cependant une magnifique scène intimiste, joliment mise en scène, très charnelle mais manquant, paradoxalement, d’âme.

  • Episode 05 : De si hautes herbes
  • Durée : 12 minutes

Renvoyant à l’adaptation du roman de Stephen King et de son fils Joe Hill, Dans les Hautes Herbes, le cinquième épisode de cette saison profite d’une atmosphère travaillée et d’un très beau character design au rendu aquarelle. Bien qu’entretenant un vrai suspens à travers son ambiance hors du temps, presque chimérique, la courte durée de l’épisode ne permet malheureusement pas de creuser le scénario. On devra se contenter dans les dernières secondes de quelques bribes d’informations évoquant tout aussi bien une malédiction qu’une légende urbaine.

  • Episode 06 : La surprise de Noël
  • Durée : 7 minutes

Une fois n’est pas coutume, La Surprise de Noël s’adapte parfaitement à son format (très) court. Simulant une animation en stop motion, l’épisode s’avère être une réjouissante variation autour du Père Noël et des comtes pour enfants. Une petite merveille, originale, astucieuse et délicieusement cynique, se payant le luxe de s’offrir un beau clin d’oeil au cinéma de Guillermo del Toro. L’un des meilleurs opus de cette Saison 02.

  • Episode 07 : Module de secours
  • Durée : 13 minutes

Se déroulant en huis clos (exception faite de quelques flashbacks), un pilote (Michael B. Jordan), doit échapper à la surveillance d’un robot dans une pièce minuscule. Pitch assez limité mais permettant à Module de secours d’aller droit au but en parvenant à maintenir une certaine tension. Bien que profitant d’une motion capture bluffante, l’épisode a toutefois du mal à aller au delà de son aspect technique et ce malgré un montage resserré afin d’accentuer la dangerosité de l’instant.

  • Episode 08 : Le Géant noyé
  • Durée : 13 minutes

Tournant autour d’un géant échoué sur une plage près d’une ville de pêcheurs, l’épisode, principalement narré en voix OFF, suit Steven, dépêché sur les lieux pour le compte des autorités. Témoin de la fascination des habitants pour la créature, Steven va suivre la lente décomposition de la créature et la désaffection progressive des riverains pour cette découverte. Mélancolique et métaphorique (on pensera ici au commerce abusif des baleines) Le Géant noyé (adaptation d’une nouvelle de JG Ballard) évoque le temps qui passe, la notion de vie et de mort tout en abordant la nature humaine, toujours prompte à exploiter un événement, aussi dramatique soit-il, pour son propre intérêt.

A l’inverse de la première saison qui maitrisait mieux son format tout en s’appuyant sur d’excellents twists se rapprochant de ceux d’une série comme The Twilight Zone, la S02 de Love, Death + Robots semble souvent prisonnière de ses durées. Alors que certains épisodes (Le Robot et la Vieille Dame, La surprise de Noël) s’en sortent avec brio, d’autres en revanche (Le Témoin, De si hautes herbes) esquissent leur sujet en laissant une impression d’inachevé.

Yannick Le Fur

Yannick Le Fur

À lire aussi...