S’inscrivant dans la lignée des premières grosses productions à destination de la Playstation 5, aux côtés de Returnal ou bien encore Demon’s Soul, Kena : Bridge of Spirits choisit justement de confronter un design à la limite de l’enfantin, semblant destiner le jeu aux plus jeunes, à une science du boss plus ou moins héritée des titres de From Software. Un mixe étonnant pour une production indépendante ne manquant pas de charme.
Horizon Forbidden West ayant décidé, cette année, de laisser le champ libre aux héroïnes guerrières, Kena saisit sa chance au vol en nous propulsant dans un monde enchanteur fortement influencé par les productions Ghibli, aussi bien dans ses environnements gorgés de couleurs que son ambiance oscillant entre le monde réel et celui des esprits.
Si l’ambition première de Kena n’est nullement de concurrencer le blockbuster de Guerilla Games, le titre ici présent peaufine néanmoins chaque aspect afin de proposer une aventure certes issue d’un moule très commun de plates-formes/action mais mettant en avant les capacités de la machine de Sony tout en s’appuyant sur une recette solide à laquelle on rajoutera une quantité impressionnante de boss fights tout au long de la progression.
C’est d’ailleurs sans doute la première chose qui pourra étonner, autrement dit ce paradoxe entre l’univers très coloré, mignon, tout en rondeurs et sa relative difficulté dès le mode Normal. On en viendrait presque à se demander si l’idée d’Ember Lab n’était pas de prouver à qui en doute que l’un n’empêche pas l’autre. Toujours est-il que vous allez souffrir dans Kena, principalement lors des rencontres contre les boss émaillant l’aventure, le reste de celle-ci ne présentant pas une grande difficulté autant grâce (à cause) au côté longitudinal de la progression qu’aux énigmes, agréables, mais se répétant rapidement dans leurs mécanismes. Non, ce qui pourrait se présenter comme un rouage grippé pour qui pense profiter d’une jolie promenade de santé (sans pour autant devoir passer par le mode Facile) sera donc synonyme de combats de boss puisque plus d’une quinzaine d’entre-eux viendront rythmer votre périple.
Who is the boss ?
Peut-on pour autant parler de «Soulsisation» de Kena ? Je n’irai pas jusque là bien que dans l’approche de certains boss, la connaissance des patterns associée à de bons réflexes puisse faire penser à du From Software. D’autant plus vrai que plusieurs boss font mal, très mal même, la moindre erreur étant souvent synonyme de gros dégâts. On pourra ainsi ranger ces adversaires en deux catégories, la plupart d’entre eux (abordables) devenant des ennemis communs une fois vaincus alors que les autres (moins nombreux, mais bien plus dangereux) pouvant être associés à des défis ultimes avant de changer de zone, le titre étant composé de plusieurs biomes, chacun gardé par un esprit que vous devrez libérer.
Dans ce cas, vous devrez scrupuleusement analyser le timing des attaques et user à bon escient de vos capacités pour avoir une chance de vaincre votre adversaire. A ce sujet, si on peut regretter une panoplie de mouvements assez restreinte, cet état de fait n’est jamais frustrant d’autant que les mouvements à disposition s’avèrent suffisants pour ce qu’on réclame de notre part. D’ailleurs, les combats de boss (encore eux) vous demanderont rapidement d’alterner entre l’utilisation de votre bouclier, votre arc ou l’usage de vos précieux Rot, d’adorables petites créatures qu’il conviendra de chercher dans les niveaux. Ces derniers vous permettront d’utiliser une magie afin de générer une créature pour accéder à certains endroits, des coups plus puissants ou vous redonner de la vie en plein affrontement. La méthode est éprouvée, mais force est de constater que ça fonctionne diablement bien dans le cas présent.
Qu’est ce que Kena vaut ?
En somme, bien qu’il soit indéniable que Kena : Bridge of Spirits ait profité d’une sortie sans véritables concurrents, il convient malgré tout de ne pas minimiser ses évidentes qualités, certes cachées derrière une grande impression de déjà-vu, mais cimentant un socle très solide. Mettant en avant un aspect écologique quelque peu naïf, mais s’inscrivant lui aussi dans un tout cohérent, à travers des cinématiques maîtrisées évoquant par moments un film d’animation, le jeu d’Ember Lab cherche simplement à faire du mieux qu’il peut (dans la limite de ses moyens) en offrant aux joueurs une aventure construite sur les bases de décennies de jeux d’action/plates-formes mais aussi et surtout mue par la volonté farouche de livrer un produit fignolé au plaisir de jeu immédiat. Une telle proposition ne se refuse pas.
Très classique dans sa structure, mais indéniablement peaufiné à tous les niveaux, le jeu d’Ember Lab se montre aussi superbe sur la forme que simple et agréable dans le fond. Si on pourra lui reprocher de ne jamais chercher à réinventer la roue ou un scénario assez simpliste, Kena comprend suffisamment d’atouts pour attirer le joueur dès ses premiers instants et ne plus le lâcher par la suite. La simplicité de la méthode joue de fait en sa faveur, tout comme ses boss demandant un minimum de skills pour être défaits, et si on regrettera une difficulté surhumaine au delà du mode Normal, l’aventure s’avère, dans tous les cas, attrayante et très rafraîchissante.