Pensée, entre autres choses, pour concurrencer The Boys (Prime Video), Jupiter’s Legacy représente la première pierre du partenariat entre MillarWorld et Netflix, la plate-forme ayant d’ores et déjà acquis les droits de plusieurs autres comics de l’auteur Mark Millar (Kick-Ass, King’s Man, Superman Red Son). Après une réjouissante Saison 2 d’Umbrella Academy, c’est donc au tour de Jupiter’s Legacy de s’inviter au bal. Malheureusement, cette première saison comporte nombre de faux pas.
Le grand public étant de plus en plus coutumier des univers supers-héroïques, il est aujourd’hui de plus en plus difficile de se démarquer des autres productions. Délaissant le gore décomplexé de The Boys et le second degré d’Umbrella Academy, Jupiter’s Legacy choisit (sans doute à tord) un ton beaucoup plus sérieux à travers une galerie de personnages qu’on suit à travers deux époques différentes. Une idée qui a du sens afin de présenter l’univers et l’évolution de la première génération de héros sur une période assez vaste mais qui malheureusement pose plusieurs soucis.
Déjà, le rythme de la série en pâtit grandement en ne décollant jamais vraiment et en se heurtant à une construction mal pensée alternant constamment entre présent et Origin Story sous forme de flashbacks se situant dans les années 30. Prenant comme point de départ le krach boursier de 1929, ce dernier sert d’élément déclencheur à la quête de Sheldon Sampson, futur chef de file de l’Union, groupe de supers-héros dans la grande tradition des Avengers ou de la Justice League. Assailli de visions, celles-ci le mèneront vers le milieu de l’Océan Atlantique où il découvrira avec ses compagnons d’infortune, une vérité qui changera à jamais leurs destins. S’étalant sur les 8 épisodes que comporte la saison, ce passé aurait sans doute gagné à être condensé en un seul segment tant ces flashbacks perturbent l’avancée de l’histoire principale en amenant peu ou prou les mêmes dialogues d’une scène à l’autre. Le soupçon d’exotisme émanant de la traversée en bateau et de la visite d’une île évoquant celle de King Kong n’y changera pas grand chose. Cette alternance constante entre passé et présent ne fait finalement que mettre en lumière les carences d’un scénario n’ayant pas grand chose à raconter et ses nombreux personnages caricaturaux.
Il est d’ailleurs difficile d’apprécier n’importe lequel des membres de l’Union, régie par un code moral dont Utopian ne cesse de nous rappeler les préceptes toutes les dix minutes. Tu ne tueras point, tu n’interféreras pas dans les décisions politiques, ce sacerdoce sera continuellement au centre des thématiques, encore plus après que Brandon, le fils de Sheldon, ait tué un super-vilain sur le point d’anéantir l’Union au terme d’un affrontement ressemblant davantage à un fan-made friqué qu’à la conclusion supposément épique du premier épisode d’une super production. Ce problème d’écriture se retrouve d’ailleurs à travers l’ensemble des protagonistes. Lady Liberty, la femme d’Utopian, s’avère relativement effacée et principalement destinée à se retrouver entre son mari et son fils pendant que sa fille Chloe se montre à ce point destructrice qu’on nous le fera comprendre pendant les quatre premiers épisodes où dépravation et drogue formeront son quotidien. Walter, frère de Sheldon, réglera quant à lui, en l’espace de quelques secondes, ses querelles fraternelles afin d’obtenir ses pouvoirs lors d’un ultime flashback aussi expédié que peu convaincant.
Inutilement bavarde, bien trop lente malgré des épisodes oscillant entre 39 minutes et une heure, Jupiter’s Legacy ne parvient pas non plus à convaincre en terme de vfx, souvent disgracieux, ses maquillages pas toujours très heureux ou ses scènes d’action aux fonds verts trop apparents et dénotant d’un cruel manque de dynamisme. La galerie de héros ne forçant jamais l’empathie, à cause d’un jeu d’acteurs très souvent discutable, on a bien du mal à se passionner pour ces derniers tant ils évoluent tels des fantômes à l’intérieur de cette première saison manquant cruellement d’enjeux, de retournements voire tout simplement d’intérêt malgré un cliffhanger annonçant une suite plus intéressante.
Avec son Origin Story prenant trop d’importance au sein de la saison, cette dernière n’arrive jamais à avancer comme elle l’aurait dû, parasitée par d’innombrables flashbacks impactant directement son rythme. N’ayant finalement pas grand chose à raconter, Jupiter’s Legacy tourne en rond pendant 8 épisodes en répétant inlassablement la même rengaine à travers une galerie de personnages très caricaturaux, une action mollassonne jamais aidée par des effets spéciaux peu convaincants ou un design global inesthétique. La série se laisse toutefois suivre distraitement jusqu’à son cliffhanger annonçant une Saison 2 plus sombre mais a-t-on seulement envie de la suivre jusque là ?