Après une première saison exceptionnelle qui oscillait brillamment entre introspection de ses personnages et idées scénaristiques originales, The Lazarus Project se devait, non pas de se réinventer, mais plutôt d’étoffer son univers pour consolider ce que laissait présager son cliffhanger. En un sens, c’est totalement la voie qu’elle emprunte sauf qu’on pourra se demander si le show de Skyline a les épaules assez larges pour supporter le poids de ses ambitions.
Après avoir intelligemment dépoussiéré le concept de voyage dans le temps à travers une première saison fabuleuse, Joe Barton se devait de passer la seconde en faisant évoluer son intrigue et ses personnages. Logique donc que la S02 de The Lazarus Project soit plus ambitieuse autant dans l’entremêlement de ses différentes timelines, de ses personnages confrontés à leurs doubles ou même du fil rouge tournant autour du personnage de Wess. Ainsi, si on perd en questions philosophiques, choix existentiels ou même d’idées résolument brillantes à l’image de l’incroyable séquence de l’accouchement de la S01, cette S02 opte pour une histoire plus macro tournant autour de la possibilité de voyager dans le temps. Après nous avoir montré ce qu’il était possible d’en faire pour, a priori, le bien de l’humanité, Barton se questionne lui-même à travers ses personnages sur le bien fondé d’une telle technologie, sur ce qu’elle pourrait engendrer de pire entre de mauvaises mains.
Pour autant, rien n’est blanc dans The Lazarus Project et c’est sans doute ce qui fait sa force. Ces zones constamment grises, ces actions délibérément violentes qu’elles émanent des « antagonistes » ou de George bloqué dans une boucle qu’il débute en tirant sur l’un de ses collègues en manquant de le tuer, procurent au show un côté hypnotique d’autant qu’une fois le plus, l’excellent casting est totalement investi, aidé par des dialogues au cordeau, qu’ils soient lourds de sens ou plus légers. On retrouve d’ailleurs cet équilibre subtile, ce mélange de tons dans cette S02 alternant entre passages durs, violents et instants beaucoup plus amusants tournant autour de George essayant de prouver par tous les moments à Sarah que leur rencontre était prédestinée, quitte à approcher sa fiancée du passé pour convaincre celle du présent.
A ce sujet, on louera un montage parfaitement pensé afin de ne pas perdre le spectateur. La saison a beau faire du yo yo entre les époques (2024, 2012, 2018) et les différentes versions des protagonistes, l’intrigue ne souffre jamais (ou presque) d’un aspect brouillon nous faisant nous demander qui est qui. Au contraire, tout s’emboîte avec fluidité et si on pourra critiquer certains aspects de la narration, la série ne perd pas de temps (ça aurait été un comble vu le sujet) et utilise au mieux ses 8 épisodes à la durée fluctuante (entre 38 et 45 minutes) en fonction de ce qu’elle a à raconter.
Prônant un aspect intimiste sur fond de trame cataclysmique synonyme de boucle éternelle, cette deuxième saison s’avère toutefois moins inventive dans ses situations bien que quelques passages conservent ce délicieux humour anglais jouant sur les mots ou les actions à l’image de la course-poursuite haletante de George à travers plusieurs pays se finissant en queue de poisson (Episode 1). Jouant avec ses références (délicieux dialogue autour de Retour vers le Futur et Jurassic Park), n’hésitant jamais à ironiser à propos d’une violence synonyme de meurtres en série pour mieux l’expier à travers les relations entre les personnages, The Lazarus Project n’échappe malheureusement pas à plusieurs défauts scénaristiques (le retour un peu prompte de George au sein du projet Lazarus, les membres de la Faille temporelle laissant leur complexe à l’abandon comme si de rien n’était) ou formels (les horribles fonds verts durant les scènes en véhicules, les scènes d’action mollassonnes). Rien de vraiment préjudiciable néanmoins d’autant qu’au détour de certains épisodes, la série fait un focus particulier sur plusieurs personnages l’agence afin de mieux les cerner. A ce titre, l’Episode 5, entièrement pensé comme un flash-back autour de Janet, reste l’un des meilleurs de la saison. Expliquant aussi bien les détails d’une vaste opération censée changer la face du monde que le dilemme de Janet devant modifier le cours de l’histoire en un minimum de temps tout en empêchant son double de causer des dégâts irréversibles, l’épisode est un amalgame de toutes les bonnes idées de la série, des questionnements que peut engendrer une telle technologie (peut-on tuer quelqu’un avant qu’il ait fait quelque chose de mal ?) aux moyens de l’utiliser.
Au terme de ses épisodes, cette S02 aura donc réussi à passer la seconde en conservant ce qui faisait la force de la première saison tout en usant de son concept pour amener davantage d’enjeux. Bien qu’on puisse être un peu surpris par les motivations de certains (peu expliquées alors qu’elles servent la fin de saison), il y a fort à parier que la S03 reviendra sur tous ces points. Espérons simplement qu’elle ne fasse pas trop de surplace et qu’elle ne recycle pas les différents concepts jusqu’ici très bien intégrés à l’intrigue.
Complémentaire à la première saison, la S02 de The Lazarus Project voit plus grand, autant dans son scénario (intégrant nouveaux personnages et enjeux majeurs) que dans son action. Prenant néanmoins le temps de creuser l’aspect intimiste des choses (la relation George/Sarah, le passé de Janet et de divers personnages de l’agence), elle s’avère aussi prenante que la S01 bien que moins inventive. Toutefois, entre son humour savamment distillé, ses excellents comédiens et plusieurs retournements de situation, elle garde le cap jusque dans son plan final annonçant d’ores et déjà une S03.