Après une Saison 02 qui s’était avérée légèrement décevante malgré quelques pépites, l’anthologie de David Fincher et Tim Miller, Love, Death + Robots, aura cette fois pris le temps de murir ses sujets et thématiques via 9 nouveaux épisodes. Bien que ce Volume 03 n’échappe pas encore totalement au piège des scénarii qui auraient mérité d’être plus approfondis, cette nouvelle salve d’épisodes évite la plupart des errances de la précédente saison et se montre des plus enthousiasmantes.
- Episode 01 : Les Trois Robots : Stratégies de sortie
- Durée : 10 minutes
Alors que nous avions déjà croisé leur route dans un excellent épisode du Volume 1, nos trois robots reviennent une nouvelle fois pour contempler (et apprécier à sa juste valeur) les vestiges fumants de la civilisation humaine. Drôle, cynique et intégrant au passage un message politique, social et écologique sous-jacent, ce premier épisode est une franche réussite qui en l’espace de moins de 10 minutes brosse un portrait peu reluisant de l’humanité (qu’elle soit imaginaire ou réelle) dépassée par ce qu’elle a engendrée. Une délicieuse introduction jusqu’à son plan final aussi drôle que bien vu.
- Episode 02 : Mauvais voyage
- Durée : 22 minutes
Retrouver David Fincher à la réalisation justifie à lui tout seul le visionnage de cet épisode. Attendu que l’homme n’a rien réalisé depuis Mank (2020), il est plaisant de voir qu’il n’a rien perdu de sa minutie, même dans un format court en full 3D, support qu’il aborde pour la toute première fois. Nanti d’un scénario simple mais qui va droit au but, épaulé par une réalisation terriblement efficace et d’excellentes idées visuelles dont sa magnifique créature qui aurait autant sa place chez Lovecraft que Jules Verne, Mauvais Voyage nous comte l’histoire de marins pris en otage par un crabe géant désirant accoster sur une île pour contenter son insatiable faim. Gore, entretenant du début à la fin cette atmosphère anxiogène, jouant sur les rapports entre les marins et la paranoïa qui s’installe à mesure que les morts s’accumulent, ce sketch tient en haleine jusqu’à la toute dernière minute. Une petite merveille.
- Episode 03 : Le Pouls Brutal de la Machine
- Durée : 17 minutes
Profitant d’un design s’inspirant dans ses tons de l’œuvre de Moebius, ce court s’avère assez décevant dans sa narration et son rythme trop lent voyant une astronaute tentant de survivre en transportant le corps de son copilote. Survival science-fictionnel oscillant entre rêve (résultant d’un shoot de médicaments) et réalité, l’épisode vaut principalement pour sa direction artistique (synonyme de très beaux décors évoluant au fil des hallucinations de l’astronaute) mais se montre trop basique pour susciter un véritable intérêt malgré sa dimension philosophique autour de la vie et de la mort.
- Episode 04 : La Nuit des Petits Morts
- Durée : 7 minutes
Evoquant le twin stick shooter Dead Nation, La Nuit des Petits Morts condense en l’espace de 7 minutes une invasion zombie à l’échelle mondiale, de son point de départ jusqu’à sa conclusion. Ce n’est donc nullement dans le fond qu’il impressionne mais plutôt dans la forme avec ces êtres minuscules nous donnant l’impression d’assister au microscope à la destruction d’un peuple de lilliputiens. Drôle, charmant et profitant d’une superbe animation en stop-motion, cet épisode s’amuse qui plus est à parodier les codes du genre avec beaucoup de brio.
- Episode 05 : Allez, Feu !
- Durée : 13 minutes
Sorte de mixe entre Predator et le comics Weapon X, Allez, Feu ! ne s’embarrasse nullement d’un scénario et préfère se concentrer sur l’action. Une excellente chose d’autant que celle-ci s’avère gore à souhait. Classique dans son pitch (une escouade de mercenaires aux prises avec une créature génétiquement modifiée par la CIA), l’épisode profite d’une animation très dynamique et d’un design marqué (renvoyant par certains côtés à l’excellente série Lastman) et se montre aussi jouissif que ses modèles issus des films d’action des eighties dopés à la testostérone.
- Episode 06 : L’essaim
- Durée : 17 minutes
Et si l’humanité pouvait utiliser un essaim de créatures millénaires pour résoudre les problèmes de famine et de maladies ? C’est le point de départ de L’essaim, inspiré de la nouvelle Swarm de Bruce Sterling, qui plonge deux scientifiques dans un environnement extraterrestre, au sein d’une ruche géante peuplée de créatures connectées entre elles. Adoptant la notion de conquête et de survie d’un point de vue philosophique, l’épisode se perd dans des dialogues quelque peu boursouflés et profite malheureusement d’un design assez inégal. Malgré sa fin possédant un second niveau de lecture, ce segment aurait sans doute gagné à plus se concentrer sur son idée première (mettre à profit les capacités de la ruche pour sauver l’humanité) plutôt que de naviguer entre plusieurs thématiques difficiles à développer en si peu de temps.
- Episode 07 : Les Rats de Mason
- Durée : 10 minutes
Mason, un fermier voyant sa grange envahie par des rats, fait appel à une compagnie pour lui vendre un robot spécialisé dans l’extermination des rongeurs. Va s’en suivre une véritable boucherie entre la machine et les mammifères. Les Rats de Mason se montre particulièrement efficace grâce à son humour, son aspect gore et son histoire critiquant l’escalade militaire ou tout simplement la dépendance de l’homme vis à vis de la technologie. Une chouette pastille, ironique et comique à souhait.
- Episode 08 : Dans l’Obscurité des Profondeurs
- Durée : 14 minutes
Faisant écho au récent The Dark Pictures Anthology : House of Ashes, Dans l’Obscurité des Profondeurs démarre par un postulat somme toute classique (des marines traquant des insurgés dans des montagnes afghanes afin de délivrer des otages) avant de basculer rapidement dans une horreur lovecraftienne. On passera rapidement sur la bêtise des bidasses lors de leur progression dans les tunnels pour profiter d’un excellent niveau technique, d’une ambiance extrêmement gore, sombre, d’une tension savamment entretenue, d’un monster design particulièrement réussi et d’une fin glaçante.
- Episode 09 : Jibaro
- Durée : 17 minutes
Sans doute l’épisode le plus étrange et fascinant de ce Volume 3 qui, logiquement, ne mettra pas tout le monde d’accord. Variation du mythe de la Sirène, Jibaro met constamment mal à l’aise à travers ses corps longilignes, ses focales déformées, ses images semblant parfois issues d’un found footage bizarroïde et sa créature aussi envoûtante que dérangeante à même d’entrainer une escouade de chevaliers au fond d’un lac grâce à ses chants et sa danse hypnotique. Un exercice de style possédant, comme le mythe qui l’inspire, un fort pouvoir d’attraction.
Sans égaler le Volume 1, ce Volume 3 de l’anthologie gomme les quelques errances de la précédente saison. Aussi disparate dans ses thématiques que ses univers, ce Volume profite, qui plus est, de réalisations de haute volée et de durées plus longues permettant aux épisodes de mieux approfondir leurs idées motrices. Bien qu’on échappe pas encore à quelques épisodes trop classiques ou ambitieux pour le format, Love, Death + Robots conserve cet imaginaire, cette folie et cet humour lui offrant un indéniable cachet artistique.