Seize ans que Jason Statham n’avait pas eu l’occasion de retravailler avec Guy Ritchie avec qui il avait signé Arnaques, Crimes et Botanique, Snatch, et Revolver. Il aura donc fallu attendre tout ce temps pour retrouver les deux compères autour de ce remake américain de l’excellent Le Convoyeur sorti en 2004. Un retour attendu pour un film qui l’était tout autant.
Bien qu’expurgé de la dimension sociale du long-métrage original, Un Homme en Colère en reprend néanmoins la base. H, autrement dit Patrick Hill (Jason Statham), se fait embaucher dans une société de transports de fonds sujette depuis quelques mois à plusieurs braquages. Cachant son passé à ses collègues, Patrick va peu à peu révéler d’étonnantes capacités une fois sur le terrain en faisant preuve d’un étonnant self-control.
Un Homme en Colère choisit de s’éloigner assez rapidement du Convoyeur, aussi bien dans sa structure que dans son ton, notamment à travers la réalisation de Guy Ritchie offrant à ce remake une dimension d’actioner absente du film de Nicolas Boukhrief, plus anxiogène dans ses thématiques, sa photo ou bien encore le personnage d’Alexandre formidablement interprété par Albert Dupontel. Exit la fragilité physique de l’homme, Ritchie troque au contraire ses hésitations contre une précision et un sang-froid à toute épreuve faisant de H un personnage constamment au-dessus de la mêlée, calculateur, redoutable, sans pitié. Un rôle taillé sur-mesure pour Jason Statham jouant de son flegme et de sa carrure d’homme fort.
Profitant d’un premier acte à la tension savamment entretenue, Un Homme en Colère échoue malheureusement à offrir suffisamment d’épaisseur à la plupart de ses rôles secondaires pourtant interprétés par des comédiens chevronnés tels Andy Garcia, Holt McCallany ou bien encore Josh Harnett incarnant le joyeux vantard Boy Sweat Dave dont le rôle aurait gagné à être bien mieux défini en amont.
Le film affiche d’ailleurs un trop-plein de personnages puisque dans sa deuxième partie, l’intrigue s’accélère en jouant sur deux tableaux à l’image de son protagoniste principal. Pour agencer le tout, Ritchie multiplie les flash-backs et délaisse son style habituel en optant pour d’amples mouvements de caméra aérienne, d’angles plus ouverts ou au contraire proches de Patrick lorsque celui-ci déambule dans la société de transport de fonds. Plus impersonnelle (à l’inverse des Sherlock Holmes, premiers films hollywoodiens de l’anglais, qui portaient sa patte), moins démonstrative, moins recherchée, la réalisation de Guy Ritchie n’en reste pas moins élégante, portée par son sujet et des personnages moins excentriques.
L’autre différence entre Un Homme en Colère et Le Convoyeur nous plonge dans le quotidien des braqueurs, ce que ne faisait jamais Boukhrief puisque tel n’était pas le propos de son film, plus intimiste et centré sur Alexandre. Alors que Patrick Hill s’avère moins complexe que son homologue français, Guy Ritchie choisit de compenser cette carence en s’attardant sur l’équipe de braqueurs, afin de les humaniser et de développer des conflits au sein du groupe. Bien que l’idée ait du sens, elle ne profite malheureusement pas d’un développement suffisant pour réellement passionner. De son côté, le rôle de Scott Eastwood, sorte d’équivalent au Waingro de Heat, aurait lui aussi gagné à être plus développé autrement que pour amener une fin différente et moins percutante que celle du film de Boukhrief.
Portée par la réalisation élégante de Guy Ritchie, Un Homme En Colère conserve une force et une tension grâce à la prestation de son acteur vedette. Construit sur les bases du film de Boukhrief, le remake en dévie rapidement à travers une sous-intrigue et un focus inédit sur les braqueurs. Si on regrette des dialogues un peu fades et qu’on aurait apprécié que les personnages secondaires soient plus développés, l’ensemble se montre séduisant dans sa noirceur et sa tension allant crescendo. Ne portant jamais vraiment la patte de son réalisateur, le film s’appuie néanmoins sur l’excellente BO de Chris Benstead et une action parfaitement orchestrée (sans atteindre les cimes du cinéma de Mann) pour assurer le spectacle.