Après avoir redoré le genre horrifique à l’ancienne après des années de Found Footage, The Conjuring nous aura offert une suite efficace, suivie par plusieurs spin-off des plus dispensables. Troquant sa place de réalisateur contre celle de producteur, James Wan passe les rennes à Michael Chaves (le peu reluisant La Malédiction de la Dame Blanche) tout en s’occupant du scénario ici aussi inspiré d’une des affaires des époux Warren. Cependant, la sacro-sainte maison hantée laisse cette fois sa place à une enquête policière permettant à la saga d’explorer d’autres horizons à défaut d’engendrer de véritables frissons.
C’est sous couvert du très médiatique procès d’Arne Cheyenne Johnson qui avait plaidé la possession démoniaque en 1981 que débute ce nouveau volet de The Conjuring, par le biais d’un éprouvant exorcisme dont tout va découler. Citant au détour d’un plan l’Exorciste de William Friedkin, The Conjuring : Sous L’Emprise du Diable n’en possède malheureusement pas l’atmosphère suffocante. Trop occupée à reproduire l’esthétique léchée du premier film, l’introduction peine à convaincre tant dans sa thématique vue et revue, que la séquence d’exorcisme, relativement efficace sans pour autant provoquer l’effroi recherché.
La suite s’avère toutefois plus originale puisque s’articulant non plus autour du concept de maison hantée mais à travers une enquête qui demandera aux Warren de prouver que le jeune Arne était à son tour possédé et donc non responsable de plusieurs meurtres qu’on lui attribue. Intéressante, l’idée permet de confronter le couple à la Justice américaine, prompte à faire jurer ses témoins sur la Bible mais bien plus sceptique lorsqu’on évoque la possession démoniaque. Malheureusement, là où il y avait matière à creuser la chose, Chaves et Wan semblent faire volte-face en plein milieu de l’intrigue en revenant à une structure plus convenue prompte à aligner les jump-scares (moyennement efficaces) aux dépens de son sujet principal.
Frustrant d’autant qu’en hésitant entre les deux approches, le film se montre moins anxiogène en diluant notamment le sentiment d’oppression et d’enfermement, principal générateur de sensations fortes et d’étouffement des précédents épisodes. Ce ressenti se verra renforcé par la réalisation de Chaves, élégante et privilégiant les amples mouvements aériens de caméra quand il s’agit de suivre ses personnages, mais bien moins inspirée lorsqu’il s’agit de faire grimper le trouillomètre. Servi par la très belle photo de Michael Burgess (Annabelle : La Maison du Mal), The Conjuring : Sous L’Emprise du Diable se montre aussi raffiné que peu inventif dans ses mécaniques (abusant du champ-contrechamp) quand il s’agit de générer des frissons et ce, malgré plusieurs emprunts au cinéma de genre à commencer par le Conjuring de James Wan.
Oscillant constamment entre le film d’horreur qu’il cherche à être et son envie de proposer une histoire plus proche des époux Warren en les présentant plus humains, plus fragiles, ce nouveau volet se retrouve souvent pris au piège par ses hésitations et son envie tardive de revenir aux fondamentaux de la saga. Ne pouvant se reposer sur une figure horrifique forte (à l’image de la Nonne ou du Crooked Man de The Conjuring 2), le tout perd peu à peu de sa force d’autant que l’aspect rural de Brookfield, qui aurait pu donner une tonalité différente au long-métrage, n’est jamais véritablement mis en avant autrement que lors d’une scène en forêt partant d’une idée intéressante mixant présent et passé mais platement mise en scène.
Correctement emballé par Michael Chaves qui soigne son cadre et sa photo, soutenu par ses acteurs livrant une excellente prestation, ce troisième The Conjuring s’avère malheureusement moins efficace quand il s’agit de faire frissonner. Ne cherchant pas à développer son sujet plus que de raison, Sous l’Emprise du Diable se montre quelque peu frileux, au point de revenir à une progression plus classique en plein milieu de parcours. Etirant son récit jusqu’à diluer tension comme attention, ce nouveau The Conjuring aurait sans doute gagné à creuser l’aspect judiciaire et à assumer son parti-pris initial afin de se démarquer de ses aînés dont il est voué à rester dans l’ombre.