Le jeu vidéo ayant depuis longtemps dépassé le carcan initial de nos consoles et autres PCs, il a très vite nourri d’autres médias dont le manga. De multiples séries ont été adaptées sur ce support, l’univers vidéoludique a servi de base à des oeuvres originales et certains auteurs ont même crié leur amour pour le jeu vidéo dans des séries qui ont leur ont été entièrement dédiées. Bien que nous ayons, à de multiplies reprises, évoqué plusieurs mangas/comics adaptant de grandes sagas, nous profitons de cette période de confinement pour revenir sur certains d’entre-eux, à commencer par BIP-BIP BOY, un excellent titre témoignant de la passion sans bornes d’un homme, Rensuke Oshikiri, pour le jeu vidéo.
Composé de plusieurs chapitres très courts (moins d’une dizaine de pages), chaque tome décrit avec beaucoup de nostalgie les périodes d’une vie qui semble avoir été du début à la fin placée sous le signe du jeu vidéo. Des Game & Watch à la découverte de son premier Gameboy en passant par la Playsation, l’auteur revient avec nostalgie, humour et parfois un peu d’amertume, sur des épisodes de son enfance pas toujours très drôles. Parfois brimé par ses propres camarades, Oshikiri a trouvé dans le jeu vidéo un moyen de s’évader et surtout de briller, lui qui, de son propre aveu, n’était pas vraiment un enfant intelligent ni particulièrement sportif. Bien que les premières pages sonnent comme autant de clichés (l’enfant solitaire, les engueulades avec sa mère lui reprochant de dépenser tout son argent dans les bornes d’arcade, les violences à l’école), on finit par se trouver quelques points communs avec ce jeune gamin obnubilé par sa passion au point d’attendre toute une nuit devant son magasin préféré pour la sortie de Final Fantasy V. Même sans avoir vécu au Japon, on retrouve dans ce manga l’excitation qu’on a tous connu à l’annonce de tel ou tel jeu, l’envie irrépressible d’y jouer, l’attente de la sortie d’une nouvelle console. Le mangaka se livre et son manga en devient forcément encore plus authentique. C’est sans doute la plus grande force de ce titre qui, il faut l’avouer, ne brille pas particulièrement par son dessin assez quelconque.
La lecture de BIP-BIP BOY devrait donc réveiller en vous de beaux souvenirs tout en vous faisant découvrir les lieux de villégiature des jeunes gamers japonais de d’époque, finalement pas si éloignés de ceux plus branchés de l’Akihabara d’aujourd’hui. De ces petites boutiques de quartier proposant bornes de jeux et ventes de confiseries aux salles d’arcade, repères de collégiens, en passant par les inévitables boutiques spécialisées, le manga passe en revue plusieurs années de la vie de son auteur qui n’a jamais dévié de sa passion. Oscillant entre conventions d’idoles, construction de cabanes à flan de chantier de construction (où il se retrouvait avec un ami pour jouer toute la nuit), des amitiés brisées sur fond de fierté mal placée, BIP-BIP BOY ne cherche jamais à embellir le jeu vidéo mais simplement à décrire avec beaucoup d’honnêteté quel rôle il a joué dans la vie d’un gamin qui s’est construit sur des valeurs de pixels parfois au détriment de sa vie sentimentale. Il n’y a au final pas de véritable analyse ou même de jugement, simplement plusieurs tranches de vie très sincères et donc forcément très variées. Pour toutes ces raisons, il serait dommage de se priver de ce voyage offert par Rensuke Oshikiri, exotique et très familier à la fois.